Le nouveau logiciel d'évaluation des risques du CNRC aide les navires à traverser l'Arctique en toute sécurité

- Ottawa, Ontario

Vue du devant d'un navire dans les glaces de l'Arctique
Navire naviguant dans l'Arctique

L'Arctique est un milieu de navigation complexe qui exige plus de planification que la plupart des autres régions du monde — et les risques ne font que s'accroître. En effet, le danger qu'engendre la glace varie d'une année à l'autre et les conditions peuvent évoluer rapidement lors d'évènements météorologiques. Le changement climatique raccourcit la saison des glaces, ce qui multiplie les passages libres, avec l'attrait irrésistible que cela suscite chez les aventuriers. Plus que jamais, les armateurs et les organismes de réglementation ont besoin de données actuelles pour évaluer les risques que soulève un voyage dans l'Arctique.

Déterminer la sûreté d'un itinéraire dans les eaux polaires est en grande partie une tâche manuelle qui repose sur l'expérience. Toutefois, la situation est sur le point de changer, notamment grâce au nouveau système canadien d'évaluation des risques associés au transport maritime dans l'Arctique (CASRAS). Mis au point par le Conseil national de recherches du Canada (CNRC) en collaboration avec la Garde côtière canadienne (GCC), Transports Canada (TC), le ministère de la Défense nationale (MDN), le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, le Service canadien des glaces d'Environnement et Changement climatique Canada, l'industrie du transport et diverses organisations non gouvernementales, le CASRAS facilite la planification d'un trajet sûr pour la navigation dans le Nord, la formation des pilotes qui manœuvrent dans les glaces et une réglementation maritime transparente par l'analyse des données et la production de rapports adaptés sur les risques. Le CASRAS permet de visualiser les conditions existantes et prévues de la glace en produisant des cartes codées en couleur qui délimitent les zones sûres et dangereuses.

Selon Denise Sudom, du Centre de recherche en génie océanique, côtier et fluvial, qui dirige la recherche pertinente au CNRC, le CASRAS met l'évaluation des risques au bout des doigts des exploitants de navires pour les aider à voir ce qui les attend. « En se servant des informations que renferme la base de données, ces personnes pourront tracer une route sur la carte et déterminer si la réglementation est respectée, tout en discernant les risques éventuels », déclare-t-elle.

Le CASRAS rassemble plus de 80 jeux de données : conditions et statistiques actuelles et historiques sur les glaces; prévisions à haute résolution de deux jours pour la glace; données historiques sur les conditions météorologiques, la houle et les marées; zones protégées pour la faune marine; exploitation des terres par les Autochtones et plans de conservation; renseignements sur les communautés autochtones et les ports. Le CASRAS fonctionne là où la connexion avec l'internet est incertaine ou inexistante (un problème bien connu dans le Nord). Il permet aux navires de mettre la plupart de leurs données à jour quand ils accostent dans un port, ce qui minimise l'usage du réseau et de la bande passante quand il faut les télécharger en mer.

La sécurité dans l'Arctique

Cory Toews, gestionnaire des services techniques du groupe Sécurité et sûreté maritimes à Transports Canada, croit que le CASRAS est un outil convivial offrant beaucoup de latitude aux collaborateurs. « L'information emmagasinée dans les bases de données, les fonctionnalités du logiciel et la participation constante de Transports Canada concourront au maintien des mesures de sécurité dans l'Arctique canadien. »

La priorité numéro un de Transports Canada demeure la sécurité des propriétaires et utilisateurs d'embarcations commerciales et récréatives, ainsi que la protection des côtes canadiennes. « Nous élaborons et appliquons des politiques et des règlements tout en veillant à l'administration de lois comme la Loi sur la prévention de la pollution des eaux arctiques », explique-t-il en insistant sur le fait que d'autres ministères et organismes fédéraux contribuent à rendre les eaux canadiennes plus sûres. Ainsi, les données sur les lieux de refuge, endroits abrités où un navire peut attendre du secours, présentent un intérêt particulier pour le CASRAS.

Durant l'été 2021, Transports Canada a utilisé le CASRAS pour évaluer les risques qu'il y aurait à répondre à l'appel d'un bâtiment qui aurait enfreint l'arrêté d'urgence canadien interdisant aux navires de plaisance étrangers de traverser le passage du Nord-Ouest pendant la pandémie de la COVID-19.

L'étude la plus récente sur le trafic maritime dans l'Arctique canadien révèle que la circulation y a presque triplé entre 1990 et 2015. Bien qu'il s'agisse le plus souvent de cargos et de navires gouvernementaux (des brise-glace, notamment), les embarcations de plaisance et les yachts privés proposant du « tourisme d'aventure » se font de plus en plus nombreux, avec les menaces inédites que cela suppose pour les armateurs et l'environnement. En effet, ce trafic supplémentaire pourrait engendrer de plus fortes émissions de dioxyde de carbone, perturber les écosystèmes marins avec l'intensification du bruit, avoir une incidence négative sur les collectivités côtières et éventuellement enfreindre la réglementation canadienne sur les déplacements en mer.

La Garde côtière canadienne patrouille depuis longtemps dans les coins reculés de l'Arctique, y dispensant des services de déglaçage et de sauvetage. Le CASRAS facilite ses activités dans le Nord depuis plus de 5 ans. Par ailleurs, avec l'avènement de nouveaux enjeux, la Marine royale canadienne (MRC) accentue sa présence dans la région. Dans cette optique, le Centre de recherche de l'Atlantique de Recherche et développement pour la défense Canada (RDDC), du MDN ainsi que les centres terrestres de soutien aux opérations navales et plusieurs bâtiments de la MRC ont commencé eux aussi à se servir du CASRAS. C'est notamment le cas des NCSM Harry DeWolf, Margaret Brooke et Max Bernays, les trois nouveaux navires de patrouille extracôtiers et de l'Arctique (NPEA).

Le NCSM Margaret Brooke a récemment participé à l'Opération Nanook, que les Forces armées canadiennes tiennent chaque année en déployant des navires au Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest, au Nunavut et au Labrador. Entre autres, cette opération signature vise à promouvoir la défense et la sécurité dans l'Arctique, à resserrer les liens avec la collectivité dans le Grand Nord et à effectuer des expériences scientifiques ainsi que des patrouilles qui augmenteront les capacités opérationnelles dans ces régions difficiles. La MRC était accompagnée de bâtiments de la garde côtière des États-Unis, de la marine royale danoise et de la marine française. Pendant l'Opération Nanook, le CASRAS a fourni des informations sur l'état de la glace et les conditions environnementales et a permis d'analyser les conditions de glace historiques, ce qui a facilité le choix d'un site où tester les capacités de déglaçage des nouveaux NPEA.

Mark Stoddard, chef du groupe des systèmes, de l'expérimentation et de l'analytique maritimes (M-SEA) de RDDC, coordonne l'usage du CASRAS par la MRC et coopère avec le CNRC au perfectionnement du logiciel. « Pour cela, nous devons recueillir les commentaires des utilisateurs de la MRC, faciliter l'intégration des éléments décisionnels du CASRAS lors de la planification des opérations navales et de la prise des décisions connexes, et y greffer les jeux de données du ministère de la Défense nationale », explique-t-il.

En avant toute

Le CNRC met le CASRAS continuellement à jour avec les données émanant des chercheurs et de ses collaborateurs. Chaque année, des améliorations et de nouvelles fonctionnalités sont apportées au logiciel. Tout récemment, l'équipe du CASRAS a travaillé avec le Service hydrographique du Canada afin d'y intégrer les fichiers bathymétriques de l'Arctique non pour la navigation. « L'an prochain, nous devrions y ajouter des prévisions de plus longue portée pour la glace de mer, afin d'aider les armateurs à mieux planifier leurs activités saisonnières », reprend Mme Sudom.

Alors que le CASRAS poursuit son évolution et que les services internet dans l'Arctique s'améliorent, une nouvelle plateforme en ligne, complémentaire, est en train de voir le jour. « Plus de gens pourront y collaborer et alimenter le logiciel avec de nouvelles données, de manière à le perfectionner en permanence », conclut Mme Sudom. Et c'est ce qui continuera à faire en sorte que les eaux du Nord canadien restent sûres.

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