L'intelligence artificielle ouvre la voie à un remède contre la COVID‑19

- Ottawa, Ontario

Tracer les problèmes du monde réel dans l'espoir de leur trouver une solution ouvre une fenêtre sur de nouveaux horizons

Harry Guo

Quelqu'un qui trace son arbre généalogique sur Ancestry.ca voit ses aïeux apparaître sous forme de graphe dans lequel des nœuds montrent les liens qui les unissent les uns aux autres. Derrière les écrans de Facebook ou de LinkedIn se dissimulent des diagrammes similaires illustrant vos réseaux et vos interactions.

Ces réseaux neuronaux sur graphe (RNG) fonctionnent à merveille pour structurer et relier les données volumineuses sur les réseaux sociaux. Et lorsque l'on applique les techniques d'apprentissage profond à la périphérie de ces graphes, on en retire des connaissances à partir desquelles il est possible d'échafauder des prévisions, de suivre les activités d'un groupe ou de formuler des recommandations. Pinterest, par exemple, a rehaussé la performance de son système de recommandations de 150 % en recourant aux RNG.

Les RNG se révèlent aussi d'une très grande utilité pour explorer un territoire inconnu, ouvrir la porte à de nouveaux matériaux, concevoir des circuits complexes ou inventer des médicaments, pour ne nommer qu'eux. En modifiant la forme, la structure et les propriétés du graphe, puis en recourant à l'intelligence artificielle (IA) et à l'apprentissage automatique (AA) pour extraire des informations des données massives, les chercheurs ont dévoilé un potentiel immense pour la résolution de problèmes très concrets dans le monde. Et, dans la course effrénée vers un vaccin contre la COVID-19, ils ont découvert de nouvelles molécules pour développer des médicaments.

« Les illustrations graphiques obtenues avec l'IA nous permettent de prévoir beaucoup plus vite quelles propriétés moléculaires, parmi les milliards qui existent, peuvent servir à résoudre des problèmes précis », explique Harry Guo, agent de recherches au Centre de recherche en technologies numériques du Conseil national de recherches du Canada (CNRC). « Le projet RNG, qui s'inscrit dans le programme Défi "Intelligence artificielle au service de la conception" du CNRC, crée des méthodes pour chercher et identifier rapidement les types de graphes qui présentent le plus d'utilité en conception scientifique et technique. »

Un concours international sur la conception assistée par l'IA et la COVID-19, organisé récemment par le MIT, a fait ressortir les capacités exceptionnelles du projet sur le plan prévisionnel. L'article du CNRC sur le sujet, rédigé avec la collaboration de l'Institut de recherche en intelligence artificielle Mila, de Montréal (Québec), a également été retenu pour le Colloque international sur l'apprentissage automatique de 2020. Cette réussite a attiré l'attention et devrait bientôt déboucher sur des projets analogues qui sont à la fine pointe de la science.

Canaliser la puissance de l'IA

Dans les situations comme celles que nous traversons, avec une pandémie qui paralyse la planète et une maladie pour laquelle il n'existe encore ni remède ni traitement, l'IA revêt une importance particulière, car cette technique accélère la recherche de médicaments, processus reposant essentiellement sur l'analyse de données structurées sous forme de graphique. Jusqu'à présent, mettre au point un médicament était une activité aussi laborieuse qu'onéreuse, qui supposait non seulement des recherches et des essais complexes, mais aussi un long cheminement avant que l'on obtienne l'aval d'organisations comme Santé Canada ou la Food and Drug Administration des États‑Unis.

Selon Jian Tang, professeur adjoint chez Mila et aux HEC Montréal, concevoir un nouveau médicament exige plus de 10 ans, en moyenne, et un investissement d'environ 2,5 milliards de dollars américains. « L'IA accélérerait considérablement les choses », estime‑t‑il. D'après lui, en maîtrisant la puissance de l'IA au cours des 5 prochaines années, on parviendrait aux mêmes résultats en 1 an, plutôt que 10.

En collaborant à l'élaboration de techniques générales d'AA applicables aux RNG, le CNRC et l'institut Mila sont devenus des acteurs de taille dans un milieu international où l'on compte des concurrents aussi prestigieux que le MIT et l'Université Stanford. M. Tang souligne que cette collaboration, « qui allait de soi » entre le CNRC et Mila, combine l'expertise en AA et IA appliqués à la conception, en recherche de médicaments et en apprentissage profond. Elle repoussera les limites du possible au cours des années qui viennent.

À court terme, les méthodes mises au point dans le cadre du projet RNG peuvent aussi s'appliquer à la quête de solutions pour la COVID-19. En d'autres termes, elles permettent l'exploration des jeux de données sur la pharmacopée à la recherche d'usages inédits pour les médicaments. On pourra ainsi découvrir les médicaments aux propriétés antivirales les plus prometteuses et disposera du matériel requis pour tester les molécules les plus intéressantes en laboratoire. « De telles méthodes se révèleraient d'une utilité inestimable lors de futures pandémies, car elles aboutiraient à une adoption plus rapide de thérapies et de vaccins, ce qui épargnerait des vies et atténuerait l'impact de la maladie sur la santé et l'économie », ajoute‑t‑il.

Au-delà de la pandémie actuelle

Selon Kevin Thomson, directeur du programme « IA au service de la conception du CNRC », le projet RNG fait partie d'un effort plus vaste, de plus longue haleine, du CNRC. Il mènera à la création d'outils en IA capables « d'accélérer et d'accroître la capacité du Canada à concevoir des innovations scientifiques et techniques », qu'il s'agisse de meilleurs réseaux de communication qui étendront l'Internet à haute vitesse aux quatre coins du pays à la découverte rapide de nouveaux matériaux pour combattre le réchauffement planétaire.

« Le programme "IA au service de la conception" figure parmi les programmes Défi, dont le but est de nous rapprocher des objectifs de recherche d'importance nationale grâce à des projets collaboratifs avec les universités et les petites et moyennes entreprises, conclut‑il. Les collaborations de ce genre ne peuvent que renforcer l'écosystème de la technologie, au profit des Canadiennes et Canadiens. »

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